Interview : Vincent Olla

Ceci est une retranscription écrite du podcast enregistré avec Vincent Olla en juillet 2021.

Les Secrets du Kayak - Comment vas-tu aujourd’hui ?

Vincent Olla : Ça va super bien, comme un lundi.

Mais tu sais, je suis content tous les jours. Ma vie me convient, tous les jours je trouve un petit bonheur.

Les Secrets du Kayak : Pour ceux qui ne te connaissent pas pourrais-tu te présenter rapidement dans le milieu du kayak ?

Vincent Olla : Je suis un ancien kayakiste, je ne suis pas un ligneux ni un descendeur.

J’ai pratiqué l’eau-vive et la course en ligne à haut niveau. J’ai toujours été ouvert à toutes les disciplines.

Au niveau des pratiques, il est vrai que c’est la performance qui m’attire. Donc parfois j’ai réalisé mon potentiel et d’autres fois j’ai essayé d’apprendre de tout ça.

Ensuite j’ai été dans l’encadrement dans des missions régionales et nationales. Aujourd’hui je suis toujours dans l’univers de la performance, mais dans différents sports.

J’ai commencé le kayak à 12 ans puisque j’avais un grand frère qui en faisait. Il avait cinq ans de plus que moi. Et un jour en regardant des enfant à la télé faire du kayak, j’ai compris que je pouvais en faire à 12 ans.

Donc je me suis inscrit au club de Saint-Étienne. On n'y faisait pas de course en ligne car cette pratique n’était pas très développée au sud de Dijon.

Il y avait le club de Roanne, un grand club de course en ligne. À Saint-Étienne c’était loisir et compétition, et dans le domaine de la compétition il y avait des descendeurs médaillés, pour certains aux championnats du monde et qui m’ont beaucoup apporté, Yves Masson surtout, et les frère Calliet. Ils ont été internationaux en descente.

Au début je n’étais pas passionné, je faisais juste une activité sportive de gamin. C’est un âge où tu te cherches, j’étais assez réservé.

Et petit à petit j’ai pris confiance en moi. Il m’a fallu du temps avant d’avoir confiance, j’ai mis deux ans pour vraiment accrocher. C’est une activité difficile, il a fallu savoir esquimauter, j’ai pris confiance.

Avant ça j’ai fait du foot, du judo. J’avais deux grands frères donc on était souvent dehors, je me débrouillais.

Les Secrets du Kayak : Tu te souviens de tes premières compétitions ?

Vincent Olla : Il me semble que j’en ai fait assez rapidement, c’était une sortie club. Donc 12 ans tu es en benjamin et rapidement je me suis vite orienté sur le groupe compétition du club.

Je me suis vite entraîné, presque dès le collège je m’entraînais tous les jours, donc j’ai vite pris et vite progressé à cet âge là.

On faisait de la course à pied, du bateau, du ski de fond, du vélo, c’était un jeu. Début lycée j’ai du commencer la musculation.

Et rapidement j’ai été sélectionné en descente, et comme il fallait aussi être sélectionné au slalom pour être sélectionné aux championnats de France, j’avais fait juste ce qu’il fallait pour le slalom.

Donc en cadet 1 je fais les sélections de championnat de France je fais cinquième. Et dans les trente quarante en slalom.

En cadet 2 j’ai fait un podium en championnat de France, en descente troisième.

A cette époque je ne me vois pas vivre du kayak mais je me voyais devenir champion du Monde de kayak. Mais parce que je côtoyais des champions du monde.

Il y avait à l’époque des CPEF, centre de permanents d’entraînement et de formation comme parcours aménagé. Il faut savoir qu’en France le sport est essentiellement amateur, certes il y a des pros comme au foot mais tous les autres sports olympiques, il faut faire des études à côté.

Donc il y avait des sport-étude au lycée et collège. Je n’en ai pas bénéficié au début donc j’ai redoublé au lycée.

Je m’entraînais une dizaine de fois par semaine, le kayak était mon projet de vie.

Mon premier championnat du monde en junior c’était en Suisse, une rivière compliquée et il y avait un pré-championnat du monde. J’étais allé avec des juniors 2 qui connaissaient un peu la rivière, j’ai mal navigué, j’ai fini onzième.

On avait gagné par équipe. C’est un super souvenir, paysages magnifiques.

J’adorais aller m’entraîner, me comparer aux autres. J’étais tout seul à Saint-Étienne. Pour la réussite d’un entraînement je n’avais que mon chrono. Si je l’améliorait c’était une bonne séance, sinon ça ne l’était pas.

Tu construis des qualités de motivation, de détermination. Mais tu passes à côté de fluidité de souplesse d’observation d’environnement et d’éléments techniques, et ça je vais le porter toute ma carrière.

Au départ mon entraîneur était Gilles Calliet, qui a fait les championnats du monde de 1993. Il est parti et le club a fermé, donc je suis allé dans un autre club à Saint-Étienne. Il n’y avait plus de compétiteurs donc je m’entraînais tout seul.

Et après j’ai eu comme entraîneur, Yves Masson, vice champion du monde en 1991. Il me faisait mes programmes, il me voyait une fois tous les deux mois.

J’ai redoublé ma seconde puis ma première, et là avec mes parents on s’est dit qu’il fallait que je parte à Lyon pour rentrer dans le CPEF, et il y avait un groupe d’entraînement avec Jean-Pascal Crochet, Xavier Keim, Pierre-Michel Crochet. Mais j’ai arrêté avant le BAC, j’ai fait trois mois d’école, je ne voulais que m’entraîner.

J’ai basculé sur un brevet d’État, le BE kayak. Je ne me voyais pas entraîneur, mais c’était un choix d’étude pour continuer le haut niveau.

Du coup on s’entraînait beaucoup. C’était Michel Doux l’entraîneur, nous on était un peu tout fou. On avait pas de soucis, on faisait des études, on travaillait l’été quand on pouvait. On s’entendait bien, on était adversaires mais aussi coloc, on partageait beaucoup.

Les Secrets du Kayak : A quoi ça ressemble des entraînements de kayak en descente ?

Vincent Olla : A l’époque on ne faisait quasiment pas de course en ligne. On faisait beaucoup de musculation, ski de fond l’hiver, course à pied.

Et en bateau tu as une partie eau-vive nécessaire. Sur le plat, tu fais des choses qui ressemblent à de la course en ligne. Les séances d’EB1 EB2 sont arrivées en 1997 en France en course en ligne, donc nous on faisait de l’endurance fondamentale, de l’aérobie.

Et pour de la descente en période de compétition, c’est comme en course en ligne. L’hiver tu fais de la PPG, de l’endurance et dès février-mars tu fais de l’eau-vive, et ensuite tu as des phases d’affûtage.

Il y a des similitudes, c’est pour ça qu’il y a des athlètes qui viennent de la descente.

Les Secrets du Kayak : En descente, est-ce qu’il y avait des stages comme pour la course en ligne ?

Vincent Olla : Oui, on faisait des stages plus ou moins à chaque vacances, sauf à Noël.

On faisait des rivières, des grands classiques. Ou sur des rivières pour préparer des compétitions. Et, souvent, on s’organisait des stages entre nous. Pour tester le terrain avant le jour J. On s’organisait en autonomie.

Et comme ce n’est pas simple à organiser, ce projet c’est le tien, tu sais pourquoi tu pagaies. Tu le fais pour toi.

Les Secrets du Kayak : Comment se sont passées tes années après Lyon, tu as réussis à performer au championnat du Monde ?

Vincent Olla : Ça a été difficile, en junior c’était tous les deux ans. Donc en junior 2 c’était en Norvège j’ai fait troisième, j’étais déçu.

Senior 1 et 2 ça a été difficile. On est avec les grands. Tu t’entraînes beaucoup. J’étais au bataillon de Joinville, on s’entraînait tous ensemble avec les descendeurs et le ligneux. Et c’est cette année là que j’ai découvert la course en ligne.

Sur mon projet descente je savais que je ne serais pas champion du monde du jour au lendemain. La progression n’est pas linéaire, donc des fois c’est dur, ça ne paye pas de suite. Et parfois tu passes un cap sans comprendre pourquoi.

Les premières fois que je suis monté dans un bateau de course en ligne, on naviguait au BJ, ce qui m’a plu de suite c’est la confrontation directe.

En descente tu fais face à un chrono. L’idée des Jeux ça fait rêver, en descente ça n’existait pas.

Les Secrets du Kayak : Est-ce que tu sentais une différence en terme de stabilité entre la descente et la course en ligne ?

Vincent Olla : Par exemple enlever son t-shirt dans un bateau de course en ligne c’est compliqué. En descente ça passe mieux.

Donc en course en ligne c’est beaucoup plus instable. La conduite est différente en descente avec des courants et des marmites ça demande de l’anticipation, de la lecture de la rivière, il faut aller vite savoir gérer les éléments. C’est très différents de la course en ligne où il faut battre le voisin.

Et moi en tant que descendeur je ne savais pas bien lire la rivière, j’avais un besoin d’exprimer mes qualités physiques et c’est en course en ligne que j’y arrive le mieux.

J’ai commencé la course en ligne en 1992-1993 et en 1994 j’ai fait un podium en championnat de France en course en ligne en kayak 1000 m, et deuxième en championnat de France.

Les Secrets du Kayak : A ce moment là quand tu t’exprimes en course en ligne, tu continues parallèlement la descente avec cet objectif de championnat du Monde ?

Vincent Olla : Oui en 1993 j’ai fait les deux disciplines, j’étais en liste jaune descente, on était en stage j’ai pris un short sur le rapide de la pile, j’ai nageais, j’ai explosé le bateau, je me suis fait mal à l’épaule.

En revenant du stage je me suis consacré à la course en ligne. A cette époque j’ai aussi rencontré la mère de mes enfants, Sabine Kleinhenz, qui était dans un projet similaire de course en ligne.

En 1994 j’ai basculé en course en ligne. Et on habitait à Vaires-sur-Marne. Donc je me suis donné les moyens d’y arriver.

Après l’armée j’ai fait mon DE1 un an à la fac, et j’ai fait un an à l’école de police de Paris. Cette école permettait d’être détaché à plein temps pour t’entraîner et te former.

Il y avait cette année là les championnats du Monde à Vaires-sur-Marne. Je me souviens aussi qu’à l’époque, pour faire un K4 senior il fallait candidater par écrit. Donc en 1995 j’y suis rentré avec Maxime Boccon , François During, Christophe Rouffet.

Les Secrets du Kayak : Est-ce que ça été difficile de quitter ton groupe de descente pour intégrer un nouveau groupe en course en ligne ?

Vincent Olla : Non parce que j’étais focus sur mon projet, mais c’est la culture de cette discipline qui m’a déstabilisé. C’est différent, il y a plus de logistique, les élus ont plus de poids, c’est une discipline olympique.

Et la confrontation directe, c’est moins naturel.

En 1995 l’entraîneur national c’était Patrick Masson. Il y avait un programme fédéral, un cahier des charges à respecter. On s’est pris une rafale aux championnat du Monde en K4...

Ce K4 était construit pour deux ans, et moi je m’en suis retiré. J’ai démissionné pour me focaliser en K1. Je me suis bien fait chambrer. Mais j’étais en accord avec moi même, et pour moi c’était faisable quitte à me rater au moins c’était mon plan, mon projet, j’étais mon entraîneur.

De temps en temps, je consultais Patrick Masson.

A cette époque là il y avait moins d’outils de mesure. Dans la performance il n’y avait pas de nutritionniste, et la préparation mentale commençait à apparaître, on parlait d’architecte mental en 1996. Ça faisait un peu sourire.

Aujourd’hui un entraîneur national c’est le manager entre le préparateur mental, le diététicien, le préparateur physique. Aujourd’hui tous les aspects techniques et les programmes d’entraînement tu les trouves sur internet.

Par contre manager une équipe, il faut être former pour le faire.

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Les Secrets du Kayak : En 1995 tu as du faire des rattrapages pour les jeux pour te sélectionner, un peu comme aujourd’hui on peut l’observer ?

Vincent Olla : Oui parce que le K1 1000m n’avait pas été qualifié, il a fallu gagner les piges. Et les rattrapages c’était à Séville et il fallait arriver dans les deux premiers. J’ai donc récupéré le quota, donc je suis allé aux Jeux.

C’était super, une bonne surprise. L’expérience olympique du fait de ma faible expérience de compétition de haut niveau, il y a une dimension émotionnelle super forte pour laquelle je n’avais pas l’habitude.

Il n’y avait pas une super ambiance, j’ai été déçu de ma performance. Je ne suis pas allé en finale. Il faut savoir gérer le déplacement, le matériel, il faut savoir jauger tes adversaires, je me suis fait bouffer par ma gestion des émotions positives et ou négatives. C’était une première pour moi.

On était à une heure de voiture d’Atlanta, donc je n’ai pas vraiment vu grand-chose des JO. Je n’ai pas perdu d’énergie à ça.

Après ça je me suis mis au travail pour les JO de Sydney. J’étais impressionné par les qualités physiques, et je trouvais qu’à l’époque l’encadrement ne me convenait pas.

Donc le DTN lance un appel d’offre à l’international et il recrute un directeur des équipes de France, Kersten Neumann de1997 à 2000. Il a amené une dimension athlétique plus prononcée.

Il a apporté du positif et moins positif. Il a amené les tests en musculation, l’EB1 et EB2, la quantité à outrance… pour moi c’était génial.

En 1997 j’étais pas trop mal et là un martien d’Alsace arrive, il s’appelle Bâbak ! Super fort, jeune, déstabilisant pour les anciens comme moi, et il a bousculé les codes.

Cela dit, je progresse dans mes points forts avec Kersten, en revanche mes problèmes de fluidité de souplesse et d’élasticité que j’identifie seul, j’ai beau travailler dessus j’ai du retard.

Et c’est la technique qui me limite. Je pense que le fait de m’entraîner seul et ne pas faire des exercices de prise de vague, tout ce que tu travailles quand tu t’entraînes avec quelqu’un. Après ça n’aurait peu être rien changé, j’ai aussi ma personnalité.

En 1997, on était en K4 avec Bâbak, on fait une finale. J’étais dans les deux-trois premiers français, Bâbak premier.

1998 on est allé aux championnats du Monde en K4. Le K1 c’était Bâbak, ça revenait au plus fort. Ce qui est normal.

J’avais quand même fait des finales de coupe du Monde. 1998 Bâbak est le leadership incontestable, et 1999 je ne me sélectionne pas aux championnat du Monde.

J’ai trois garçons qui sont nés l’été, et à chaque naissance je ne suis pas sélectionné au championnat du Monde. Ce n’est pas volontaire de ma part. Ce qui est marrant.

Du coup les JO de Sydney s’envolent pour moi. Je suis suppléant, je suis déçu mais mon gamin arrivait. En 2000 j’ai eu mon professorat de sport. Je n’étais pas malheureux, et je repensais ma motivation. Bâbak, m’a bien perturbé quand même.

Dès 2000 il fallait que ça claque sinon j’allais m’arrêter. Je travaillais à l’INSEP à côté pendant deux ans. J’étais tuteur de sportifs.

En 2002 j’ai déménagé en Ardèche, j’étais à la DDJS. Je me suis fait battre cette année là pendant les piges, du coup j’ai arrêté. Je travaillais à l’époque sur la dimension mentale, et je pense que ce travail m’a permis d’accepter ma retraite sportive.

Du coup j’arrête le kayak du jour au lendemain. Je travaille à la DDJS à Privas. Je suis dans la vie active. Ma vie a changé, ça m’a allégé, ça m’a fait du bien. J’étais épanoui dans ma vie.

Les Secrets du Kayak : Comment se passent les années qui suivent, au kayak mais dans une autre sphère ?

Vincent Olla : Jusque 2004, j’apprends mon métier. Et parallèlement je ne suis plus trop en contact avec le monde du kayak.

2004 il y a Benoit Peschier et Nicolas Peschier qui se sélectionnent pour les JO, j’étais licencié dans leur club et avec le maire on a monté un projet pour les suivre à la télé, j’ai repris contact à la fédération.

Et puis Christophe Rouffet en 2005 est arrivé directeur des équipes de France de course en ligne, et il m’a demandé de l’accompagner dans une équipe de soutien pour les grandes échéances : championnat du Monde, championnat d’Europe et championnat olympique.

La DDJS m’y autorise. Il y avait de la logistique, du soutien moral, je faisais le lien entre les entraîneurs, je faisais de la relation humaine. Je n’avais pas trop de contact avec les athlètes. J’ai fait ça de 2005-2012.

En 2007, j’ai quitté la DDJS en Ardèche pour entrer à la Fédération en tant que cadre technique, CTR dans la région Rhône-Alpes. Donc je partais un mois et demi tous les étés.

En tant que CTR j’étais chargé du champ sportifs : organisation des stages, organisation des entraîneurs, tu répares des remorques, tu déplaces des bateaux, tu vas à des réunions de Préfectures.

Les Secrets du Kayak : Est-ce que ça te convient ce rôle à la fédération ?

Vincent Olla : CTR c’était super auprès de Christophe, puis les deux dernières années j’avais bien envie de le remplacer, je savais qu’il partirait en 2012.

Je sentais que ça m’intéressait. Je pensais pouvoir apporter à la fédération. On était plusieurs à se présenter, et j’ai eu le poste. Moi j’ai voulu apporter une vision globale de l’individu, avec sa dimension émotionnelle.

On a pris une coach pour le projet centré autour la dimension mentale et pour le staff et pour moi, et pour les athlètes. C’était nouveau, l’idée était d’être juste, ce qui ne veut pas dire sympa.

La collaboration était importante entre tous les membres du staff, être solidaire les uns des autres c’est hyper important. Toutes mes décisions ont été dans l’intérêt de l’équipe, en lien avec mes valeurs et dans le respect du cadre réglementaire.

Par exemple j’ai du me séparer d’un entraîneur très compétent individuellement mais qui dans l’intérêt de l’équipe ne convenait plus, et qui plus est un ami proche. J’ai du lui expliquer très longuement ma décision et pour lui permettre de retrouver une place.

Chez les athlètes c’est pareil, si ce n’est que dès que tu fais une sélection le premier sous la ligne trouve toujours que c’est injuste. Je ne me suis pas fait des amis, ce qui m’embête le plus c’est quand les gens ne comprennent pas les décisions.

Ce qu’il faut savoir c’est que ce sont des cadres d’État qui font les sélections et qui n’ont aucun intérêt à sélectionner un tel plutôt qu’un autre. Ce qui m’intéressait en tant que DEF, c’est l’athlète qui semble être le plus fort en analysant les résultats, en regardant les règles de sélections etc. C’est mathématique.

Donc quand tu es DTN, tu sélectionnes sereinement. Tu ne peux pas être juge et parti. Dans certains pays il existe des pressions politiques, et pas que de la politique sportive. Donc on ne se rate pas souvent.

Je suis resté DEF quatre ans jusqu’à Rio. J’ai hérité d’une génération assez forte, brillante et riche qui est arrivée à maturité à la fin 2012. C’est la génération ouverte par Marie Delattre, et Anne-Laure Viard. Bâbak lui nous avait autorisé à gagner.

Les filles ont donné de la confiance aux athlètes suivants. C’était agréable, une belle équipe. J’étais sur les juniors, moins de 23 ans et seniors. Et c’est surtout avec les senior que j’ai beaucoup partagé.

Les Secrets du Kayak : Ça ressemble à quoi une journée de DEF ?

Vincent Olla : Tu n’entraînes pas. Ce n’est pas le job. Moi j’étais beaucoup en déplacement sur le siège fédéral ou en stage. Au siège c’est de l’administratif, beaucoup de préparation pour les déplacements, pour les coupes du Monde.

Les hôtels, notre base à Vaires, faire le point sur le matériel, toute la communication. Tu gères toute la vie de l’équipe, tu anticipes. Et puis toutes les relations avec les élus, la commission et tu as le management de l’équipe des entraîneurs qui te font part des difficultés rencontrées avec les athlètes ou même entres-eux.

Et avec les athlètes c’est différent, c’est un suivi social. Il faut tout mettre en musique.

J’ai arrête car familialement c’était compliqué, et avec le DTN Philippe Graille j’avais eu les mains libre, mener à bien le projet.

Il y a eu un changement d’équipe et je sentais bien que je n’étais pas en accord avec eux. Ça s’est confirmé par la suite.

Ce qui a changé, je dirais qu’il faut toujours innover pour progresser mais tu ne peux pas non plus brusquer les choses. Tu ne peux pas tout changer, les athlètes ont besoin d’être dans un univers qu’ils maîtrisent un peu.

Tu ne peux pas tout changer du jour au lendemain. Il faut du temps pour apprivoiser l’environnement. Si tu brises la confiance, le temps de la reconstruire il faut des années.

Certes il faut du sang neuf dans une équipe régulièrement, mais il faut un juste milieu pour la transmission de compétence et d’expérience.

Le sport, c’est simple : à un moment donné il y a une échéance, tu regardes les résultats. Je souhaites pour les athlètes que ça fonctionne.

Les Secrets du Kayak : En 2016, tu arrêtes ton poste de DEF et là c’est quoi le plan professionnel ?

Vincent Olla : Je suis retourné CTR en Auvergne-Rhône-Alpes, et on a monté un pôle espoir de slalom à Oyonnax.

Et en tant que cadre j’ai eu la chance d’encadrer à la fois des minimes, des juniors, jusqu’aux JO. Ça me plaît ces expériences.

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Les Secrets du Kayak : Qu’est ce qui t’a amené à Antibes ?

Vincent Olla : J’avais envie de voir autre chose. J’ai voulu quitter la fédération de kayak, je ne m’y retrouvais plus. Du coup je voulais aller dans un CREPS dans un département de haut niveau pour découvrir d’autres sports, d’autres pratiques.

En plus j’y avais des amis descendeurs. Je ne suis pas venu pour Antibes, je suis venu pour la mission.

Je découvre des sports collectif comme le basket, des sports professionnels avec des centres de formation, des agents autour des joueurs. Il y a aussi de la natation, la voile, les sports de nature, du golf, du trampoline, de la gymnastique.

Et donc je gère l’équilibre de vie des sportifs. Surtout des collégiens et des lycéens, en internat. De par mon parcours, je suis assez sensible au développement du sportif à long terme et au fait que pour être performant en senior il y a des fenêtres de développement, que ce soit mental ou physique, etc, il y a des fenêtre propices à ces développements.

Pour faire tout ça dans le bien-être et l’épanouissement de l’individu, puisqu’on parle tout le temps du double projet sportif et scolaire, les ado sont en plein volcan hormonal donc comment faire pour qu’ils soient épanouis ?

Le haut niveau ne doit jamais être régressif ou amenant de la souffrance.

Au CREPS je suis référent sur tout ce qui est violence dans le sport. Je suis assez sensible à ce qu’on respecte les individus. Il faut de la bienveillance et j’y suis intransigeant. On apprend tous les jours.

Les Secrets du Kayak : Est-ce que tu es remonté en kayak depuis ta retraite sportive ?

Vincent Olla : Au début j’ai fait un peu de kayak de mer et de rivière. Je n’ai plus fait de course en ligne en compétition, je n’avais plus de sensation.

Le seul truc qui me plairait c’est du kayak d’eau-vive, tranquille.

Mais je fais du vélo, de la montagne, ski de fond, ski de randonnée. Si à l’occasion je dois en faire, j’en ferai.

Si j’en fais c’est pour amener des gens qui vont en faire. Mais à titre perso j’ai préféré m’ouvrir à d’autres cultures, d’autres sports, d’autres géographies.

Ensuite en kayak il ne faut pas oublier que la logistique est lourde, si demain je peux en faire en claquant des doigts je le ferai.

Je continue de regarder les résultats sur les réseaux sociaux, mais j’ai quand même coupé.

Les Secrets du Kayak : Tes enfants ont fait du kayak ?

Vincent Olla : Oui mes trois enfants en ont fait. Ils ont fait du slalom, de la descente, de la course en ligne, du canoë.

Ils ont eu une activité polyvalente, au plus tu vas avoir une base large de pratiques sportives au plus tu es dans une dynamique de compétition, ce qui fait qu’au moment de se spécialiser il ne reste plus qu’à régler des problèmes moteur et le développement harmonieux musculaire, et plus tu seras performant.

C’est un enjeu super important la polyvalence sportive qui te permet d’aller beaucoup plus haut dans la performance sportive.

Mes enfants ont flirté avec les podiums au championnat de France, j’en ai un qui s’est blessé à l’épaule, mais ils ont trouvé qu’il y avait autre chose que le canoë-kayak.

J’en ai un qui fait encore de la descente.

Vous pouvez retrouver Vincent Olla sur son compte Linkedin.

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