Interview : Lucile Maffre

Ceci est une retranscription écrite du podcast enregistré avec Lucile Maffre en aout 2021.

Les Secrets du Kayak - Comment vas-tu aujourd’hui ?

Lucile Maffre : Bonjour, ça va très bien.

Donc je suis Lucile, j’ai 27 ans et je suis spécialiste du sommeil de sportif de haut-niveau.

J’ai un Master en chimie, pas de rapport avec le sommeil mais j’ai la chance d’être passée par l’INSEP et le laboratoire de recherche.

Mon sujet de recherche était tourné vers le sujet de la mélatonine, l’hormone du sommeil. Je devais trouver une méthode d’analyse de cette hormone. On la retrouve dans le sang, la salive et les urines des sportifs.

J’ai eu la chance de regrouper le sport, la chimie et le sommeil dans une même activité professionnelle.

Les Secrets du Kayak : Tu avais des difficultés à trouver le sommeil ?

Lucile Maffre : Oui, ça m’est arrivé adolescente. Moi j’ai un sommeil très très profond : je me réveillais parfois alors qu’il avait plu et qu’il avait fait des orages, je regardais mes parents surpris que je n’ai rien entendu.

La maison pouvait s’écrouler, moi je continuais à dormir. C’était une source d’angoisse pour moi.

Petit à petit j’ai trouvé des méthodes d’endormissement pour ne plus avoir ces angoisses, par la musique classique et partir dans un sommeil hypnagogique.

C’est comme des petites hallucinations que tu peux avoir au moment de l’endormissement. Ensuite, c’était davantage de la cohérence cardiaque, donc avoir une respiration de plus en plus régulière pour qu’elle soit de plus en plus calme.

Je suis une personne qui rêve beaucoup. Certaines personnes ne vont pas se souvenir de leurs rêves, et d’autres y sont attachés.

Donc tout le monde rêve, mais tout le monde ne s’en rappelle pas. Pour se rappeler il faut des micros éveils, ou des éveils soit pendant ou après.

Donc les personnes qui ne s’en rappellent pas, ce n’est pas mal parce que ça veut dire que leur sommeil est continue. Les personnes qui s’en souviennent, il y a un réveil qui provoque la mémorisation du rêve.

Les Secrets du Kayak : Qu’est-ce qu’un bon sommeil ?

Lucile Maffre : Bonne question, pour moi le bon sommeil est un sommeil efficace ou de qualité.

Souvent on a tendance à se dire que lorsqu’on dort 10h on est d'avantage KO que si on n'avait dormi que 7h. Le nombre d’heures n’est pas synonyme de qualité du sommeil.

Ce n’est pas parce qu’on dort 10 heures, qu’on dort réellement 10 heures. Mais si on n'a que 7 heures devant nous, psychologiquement on va optimiser ce temps là.

L’efficacité du sommeil c’est le temps qu’on dort vraiment par rapport au temps passé au lit. Une bonne efficacité de sommeil c’est au dessus de 90 %.

Il existe différentes phases dans le sommeil. A l’état de veille il n’y a qu’un seul état, on est réveillé.

Pendant le sommeil il se passe différentes choses, avec différents stades qui évoluent tout au long de la nuit : stade léger, stade profond, stade paradoxal.

Au début de la nuit on a tendance à faire du sommeil profond, et plus vers la fin de la nuit on tend vers le sommeil paradoxal. C’est pendant ce stade qu’on fait 90 % des rêves. Le reste du temps ils sont beaucoup moins précis.

Tous les stades de sommeil sont importants. Si on supprime un stade de sommeil, ou bien si on réduit un stade de sommeil, il y a forcément des problèmes de santé qui se jouent sur du moyen terme, comme des problèmes de concentration, de réflexe, de blessures etc. ou sur le long terme davantage de problèmes cardiovasculaires, maladies neurodégénératives…

Il est vrai que lorsque tu es dans uns phase de sommeil lent profond, tu as énormément de mal à t’en sortir. Le sommeil le plus facile pour se réveiller c’est à la fois le stade lent léger, le N1, ou le sommeil paradoxal car l’activité cérébrale est très proche de l’activité de veille. La seule différence, c’est l’absence de tonus musculaire.

Au sujet des siestes souvent on dit que ce n’est pas plus de trente minutes pour ne pas passer dans le sommeil lent profond, et ne pas devoir en sortir.

Souvent c'est ce que je préconise, mais tout dépend de votre activité physique, de votre vie professionnelle, de votre vie familiale… Sachant qu’une sieste ne rattrape pas le temps d’endormissement de votre nuit.

Donc pour une personne qui fait des horaires de bureau, dormir plus d’une demi-heure après le repas, c’est risquer de prendre du retard dans son travail et se réveiller dans ce sommeil lent profond, et ne pas être productif.

Contrairement aux personnes qui travaillent de nuit, ou aux sportifs de haut niveau, il peut avoir des siestes compensatrices, c’est à dire qu’on est en dette de sommeil ou on a fait un entraînement conséquent avec une intensité forte, on va avoir tendance à dormir un peu plus longtemps l’après midi, c’est souvent un cycle complet de sommeil, soit entre 1h30 et 2h.

Les Secrets du Kayak : Est-ce qu’il y a un temps universel, moyen de sommeil incompressible ?

Lucile Maffre : Personnellement je suis une grande dormeuse.

Il y a plusieurs choses qui entrent en compte, parfois le temps du sommeil et le chronotype, c’est à dire si les personnes sont plutôt du matin ou du soir.

On connaît tous quelqu’un qui à partir de 22h ne peut plus rien faire, et on connaît tous quelqu’un qui à minuit ou 1h du matin est toujours en forme.

Tous les 24h notre cycle se répète. Il y a des personnes qui vont dormir cinq ou six heures et être en forme, parce que leur efficacité du sommeil est quasi égale à 100 % ou bien, elles ont un sommeil très réparateur, c’est à dire quasi absence de micro-éveil.

Un micro éveil c’est entre 3 et 10s. Notre corps s’en rend compte, de part l‘augmentation de la fréquence cardiaque, de part les mouvements de jambes et des bras. Et donc notre sommeil se fragmente et le corps ne peut pas faire le travail de récupération, de tri ou de régénération des muscles.

Après cela dépend de tout à chacun que d’être du matin ou du soir, à savoir combien d’heures de sommeil est optimal pour chaque personne, et à quelle heure il est mieux pour une personne ou une autre pour se réveiller.

Les Secrets du Kayak : Comment on fait pour ne pas avoir de micro-éveil ?

Lucile Maffre : Il y a plein de choses. La première, faire attention à l’environnement du sommeil où l’on se trouve. Donc sa chambre, la couleur des murs. Il faut des couleurs douce. Si on a une chambre trop chargée, notre regard se tourne vers ce surplus d’informations et notre cerveau ne se repose pas.

Il y a aussi le confort de la literie. C’est primordiale.

La lumière parasite peut interférer. Il faut limiter la présence des écrans dans les chambres, ne pas aller vers ses écrans nuisibles.

En cas de présence d’animaux domestiques, ne pas leur permettre de rentrer dans la chambre.

Le bruit c’est toujours délicat, puisque ça peut être le voisinage, les pompiers, la police qui passe dans la rue, les avions, ou aussi le conjoint qui ronfle.

Les Secrets du Kayak : Est-ce qu’on dort mieux seul ou à deux ?

Lucile Maffre : Je pense que la règle d’or pour dormir à deux et avoir un sommeil réparateur, c’est de respecter le sommeil de l’autre, si certains ont des rythmes en décalé. Il faut aussi toujours échanger sur ce qui convient ou pas aux personnes.

Certaines personnes ne sont pas sujettes à la lumière, elles vont avoir tendance à laisser les volets ou rideaux ouverts, alors que la deuxième personne se réveille à la moindre lumière.

Il faut mieux tendre vers la personne sensible que celle qui l’est moins.

Les Secrets du Kayak : Quel est ton regard sur les matelas et oreillers ergonomiques ?

Lucile Maffre : Si on veut, la problématique du sportif c’est le fait d’être rarement chez lui et souvent dans des endroits très différents.

Ça peut être pour un stage, un tournois, une compétition... A chaque fois l’environnement sera différent, la literie également. Le plus c’est de pouvoir développer les matériaux et la structure des matelas, sur quelque chose d’approprié aux sportifs et d’amener facilement ce matelas sur le lieux de déplacement.

C’est là où je tire mon chapeau aux entreprises qui ont compris l’enjeu du sommeil pour le sportif qui se déplace très souvent.

Un bon matelas ça va être un matelas qui va éviter les engourdissements musculaires, faire en sorte que la position du corps soit alignée dans le lit.

Faire en sorte qu’il n’y ait pas de contractions que ce soit dans le cou, dans le dos, dans les épaules etc. Je vais travailler avec une ergothérapeute sur le rôle de la position dans le lit. Sachant qu’à chaque position, il y a une problématique différente.

D’un point de vue de la récupération le plus souvent la meilleure position pour dormir c’est sur le coté, peu importe lequel, car au niveau respiratoire l’air passe plus facilement.

Si on se met sur le ventre avec la tête de côté, au niveau respiratoire et des cervicales, ce n’est pas optimal.

Et sur le ventre les gens ont tendance à ronfler car au niveau respiratoire on a la bascule de la langue vers l’arrière, ce qui fait une légère obstruction. Aussi les tissus de la gorge ont tendance à vibrer car ils n’ont pas assez de place. Et notamment pour la respiration thoracique, le poids sur les poumons les empêche de prendre l’air nécessaire pour respirer pendant la nuit.

Donc suivant la position dans laquelle on dort, il y a des oreillers de formes et de tailles différentes à adopter. Et selon les personnes, c’est la distance entre le cou et l’épaule qui fait un oreiller optimal. Il faut respecter un angle certain.

Les Secrets du Kayak : Remarques-tu que tous ces facteurs du sommeil sont négligés à ton niveau ?

Lucile Maffre : Oui, il y a de plus en plus de gens qui s’y intéressent, même chez les sportifs. Et ils sont nombreux pendant les JO actuellement à témoigner d’un mauvais sommeil.

Je trouve dommage que les performances soient altérées par ce facteur sommeil. D’un côté on ne peut pas leur en vouloir parce que je les comprends et que j’y suis sensible.

Mais à chaque fois que j’en parle dans mon entourage, ma famille ou mes potes, ils apprennent à chaque fois quelque chose quand on aborde le sujet.

Il y a donc aussi une question d’éducation. On n’apprend pas à l’école l’importance du sommeil et pourtant ça me paraît tellement important.

Souvent j’ai tendance à faire face à des sportifs assez curieux de base, qui se documentent pour chercher les méthodes d’une meilleure performance. Ils me demandent un peu plus de détails. Ce que je fais moi, c’est un état des lieux et je leur demande leurs objectifs. Certains partent de zéro, d’autres sont déjà bien avancés sur le sujet.

Les Secrets du Kayak : Tu parlais de l’impact du décalage horaire sur les athlètes, actuellement ce sont les Jeux. Comment on s’adapte au décalage horaire pour s’adapter aux horaires de Tokyo? Comment dormir quand tu as l’excitation, l’adrénaline de la compétition quand c’est parfois l’objectif de vie pour certains ?

Lucile Maffre : Gérer un décalage horaire, on pourrait en parler des heures. On peut le préparer en amont, et c’est ce qui est préconisé. On essaie un mois avant d’anticiper sur les horaires en se décalant petit à petit.

On peut aussi porter des lunettes de sommeil pour la sécrétion de mélatonine, via les récepteurs présents dans nos yeux. Donc il existe des techniques.

Pour bien dormir la veille d’une compétition, c’est possible d’être performant avec seulement 4-5 h de sommeil à condition d’avoir eu une bonne préparation et une bonne hygiène de sommeil en amont, et si c’est ponctuel.

Mais s’il existe une dette de sommeil la veille de l’échéance, cela ne sera pas la bonne stratégie.

Nous spécialistes du sommeil, nous travaillons en réseau, on travaille sur la physionomie et la physiologie de la personne : combien d’heures, quelle efficacité…, et ensuite le travail sur l’aspect mental et sa prise en charge se fait par une autre personne.

Les Secrets du Kayak : Si on a des difficultés à dormir, qu’est-ce qu’on doit mettre en place ? Quelles sont les techniques propices au sommeil ?

Lucile Maffre : Il existe beaucoup de techniques. Ce qui est important pour le corps c’est de comprendre ce qui se produit lors de la journée.

Si on a une alternance d’activité et de non-activité, si on fait du sport, notre corps comprend cette différence d’activité motrice. Si on a tendance à rester dans la même position ou activité plate dans la journée, le moment où on va se coucher notre corps va se demander pourquoi se coucher alors que toute la journée tu as fait la même chose.

C’est ça qui est important, il faut que notre corps ait un besoin de sommeil.

La fatigue c’est bien, il ne faut pas la voir négativement. Ce qui est plus problématique, c’est la somnolence. C’est ce sentiment de ne pas émerger de son sommeil et d’avoir une somnolence continue tout au long de la journée. Pour sortir de cette somnolence on peut faire des pics d’activité pour booster un peu notre corps.

Pendant la journée je préconise l’activité physique, on va avoir tendance à boire suffisamment mais si on boit trop en soirée ça va procurer des micros éveils.

Également s’exposer à la lumière toute la journée, pour que notre corps comprenne que c’est le jour.

Ce qu’on peut faire le soir c’est manger tôt pour ne pas mélanger la digestion et le sommeil. La digestion est une activité de jour. Il est mieux de manger deux à trois heures avant l’heure du coucher.

Ne pas manger trop gras le soir. La mélatonine est issue d’un acide aminé, le tryptophane, qui se retrouve dans plusieurs aliments, donc on peut favoriser son taux. Il y a le saumon, les brocolis, les noix, les œufs, le chocolat noir, etc.

Au sujet des écrans, les applications de réduction de lumière et de filtrage, c’est fait pour rassurer les gens et leur permettre de passer plus de temps sur les écrans le soir.

Pour moi les écrans le soir ça a un double effet. La lumière, joue sur nos récepteurs. Si on continue de recevoir de la lumière et qu’on continue à rester statique sur notre canapé, notre corps est perturbé, c’est une mauvaise préparation au sommeil par un message contradictoire.

Le deuxième point dépend de ce qu’on regarde sur notre écran qui génère différentes émotions pour lesquelles il faudra plus ou moins de temps pour s’endormir.

Le mieux c’est d’arrêter les écrans au moins 1h avant d’aller se coucher.

Les compléments comprenant de la mélatonine m’enragent. La mélatonine n’est pas un somnifère, c’est un marqueur, c’est une hormone qui nous règle pour nous endormir tous les jours quasiment à la même heure. Elle est prescrite pour des gens qui veulent recaler leur rythme biologique après avoir eu plusieurs décalages horaires.

Les Secrets du Kayak : D’après certains témoignages, les personnes qui prennent de la mélatonine sont les personnes qui se souviennent le plus de leurs rêves.

Lucile Maffre : Je ne sais pas trop. Après elle a une grosse fonction sur la récupération et la structure du sommeil. Si les gens avaient tendance à avoir un mauvais sommeil et ne pas se rappeler de leurs rêves, forcément que lorsque ça devient le cas c’est un facteur marquant d’un bon sommeil pour eux.

Pour ces personnes se souvenir de ses rêves c’est qu’elles veulent progresser ou qu’elles ont des tourments pendant une période. C’est le cerveau qui lance des messages subliminaux, des angoisses aussi chez les sportifs.

Les Secrets du Kayak : Que penses-tu des tisanes pour dormir ?

Lucile Maffre : Oui le passiflore ou d’autres, moi je les aime bien. Mais toujours penser que ça peut provoquer des réveils nocturnes. Ce qui nuit au travail de récupération. Mais tout dépend du type de personne.

De façon générale être dans l’obscurité et dans le silence peut aider au sommeil.

Mais il y a aussi une part d’éducation et de génétique dans tout cela : si on a été traîné à droite et à gauche lorsqu’on était petit, et qu’on réussissait à dormir en toute circonstance. Ou si ce sont des parents qui ont toujours eu la vigilance de nous placer dans une chambre dans le noir etc, il y aura une tendance à être plus sujet au bruit et à la lumière.

L’adaptation à son environnement est importante, tout en conservant des constantes comme le matelas.

Les Secrets du Kayak : J’aimerai comme beaucoup, moins dormir et être en forme. Il y a quelque chose à la mode depuis pas mal de temps, ce sont les Power Nap, donc les micros sieste. Peut-on réduire son niveau de sommeil global ?

Lucile Maffre : Une sieste ne récupère pas le temps non dormi pendant la nuit. Power nap c’est du marketing. Tout dépend des personnes, de ton activité professionnelle, de ta situation sociale, si tu travaille de nuit ou de jour.

Il y a une tendance qui dit que la sieste a un pouvoir de redynamiser, c’est un moment de répit dans la journée. Il y a des techniques pour se réveiller avant que le tonus musculaire se retrouve à zéro.

En ce moment je travaille avec des médecins qui sont spécialistes dans l’apnée du sommeil. Ce phénomène crée des pauses respiratoires pendant notre nuit, qui ont tendance à fragmenter le sommeil.

Le sommeil est moins réparateur. On a un sommeil léger, fragmenté par des micros éveils. Et lorsqu’on se réveil le matin on est fatigué, notamment par l’augmentation de notre fréquence cardiaque au cours de la nuit.

Moi même j’enregistre le sommeil des gens, et j’utilise la polysomnographie. On a des électrodes sur la tête, des sangles sur le thorax, les abdos, un oxymètre au niveau du doigt pour mesurer la fréquence cardiaque et la saturation en oxygène. On a un capteur de ronflement, un autre de position. On a un actimètre au poignet qui mesure les mouvements.

C’est un peu perturbant, mais on arrive à dormir et ça donne un réel aperçu du sommeil des gens.

On équipe les gens dans l’après-midi pour qu’ils s’habituent avant de s’endormir. Il existe aussi les lunettes nasales.

Donc les montres c’est seulement l’équivalent de l’actimétrie. Donc leur résultats donnent une tendance, mais ce n’est pas aussi complet qu’un test.

Le test dure en moyenne une nuit. Pour faire un diagnostique le sommeil se mesure la nuit, mais on peut aussi l’enregistrer la journée.

C’est plus la somnolence qui est mesurée. Soit une latence d’endormissement, on va garder les capteurs sur la tête pour savoir combien de temps une personne s’endort. Si elle s’endort en moins de cinq minutes, à 9h, 12 h ou 16h, on peut bien comprendre que la dette de sommeil est assez importante et qu’il y a un petit problème de régulation du sommeil.

Si la personne ne s’endort pas ou peu dans la journée, alors sa régularisation de sommeil est efficace.

Le deuxième test c’est le maintien d’éveil, c’est ce qu’on fait pour les chauffeurs routiers. On leur demande de rester 40 minutes le plus éveillé possible dans des conditions similaires à de la conduite.

Statique, peu de lumière, sans stimuli extérieurs. En fait le sommeil a énormément de répercussion dans la journée. Donc les gens qui disent avoir des problèmes de sommeil ont davantage tendance à mettre un point sur ce qu’il se passe dans leur journée, que pendant la nuit.

Ça peut être des problèmes de concentration, de l’irritabilité, des pertes de performance, des problèmes de mémorisation, de l’endormissement au volant.

Il existe aussi la polygraphie pour analyser son sommeil. C’est surtout une technique respiratoire, tu n’as pas les électrodes sur la tête.

Souvent, si c’est un examen du sommeil justifié, ça peut être remboursé par la sécurité sociale. Tout dépend du motif.

Les Secrets du Kayak : Dans une optique de prévention d’un manque de sommeil et une optique de performance, est-ce que ça vaut la peine de faire analyser son sommeil pour savoir si tout va bien lorsque tu es athlète de haut niveau ?

Lucile Maffre : Moi je suis la première à vouloir les aider.

Il y a le côté subjectif, mais c’est un ressenti personnel. Ensuite il y a ce que nous dit l’enregistrement du sommeil.

Ma démarche c’est de contacter les sportifs de haut-niveau qui sont reconnus à l’échelle internationale, et qui font aussi attention à leur sommeil et leur hygiène pour les aider que ce soit pour une séance chez eux, lors d’un stage, etc. que ce soit pour mieux gérer leur entraînement ou un décalage horaire.

Ou pour des athlètes qui ont de l’endormissement tardif à cause des matchs en soirée. Ça crée un décalage horaire pour la semaine.

Moi je fais un état des lieux, puis un travail sur plusieurs mois pour optimiser les réponses à la problématique, pour arriver ensemble à atteindre leurs objectifs.

Avec le temps tous les problèmes du sommeil peuvent se régler. Une grande partie vient de l’éducation au sommeil. Donc je passe par une phase de sensibilisation et de l’hygiène de vie. Et s’il faut aller plus loin, c’est là que le travail en réseau est important et se fait avec des spécialistes en médecine.

Les Secrets du Kayak : Est-ce qu’il y a des livres ou des documentaires que tu pourrais conseiller ?

Lucile Maffre : Il existe plein de livres sur le sujet. Je pense à Damien Leger 'Le sommeil dans tous ses états', ou Pierre Philip 'Antifatigue', et il y a aussi mon site internet dans lequel il y a pas mal d’informations : lucilemaffre-sommeil.com.

Mon objectif c'est mettre cela sous forme de fiches thématiques, c'est accessible à tout le monde.

Chez les sportifs de haut niveau les problématiques sont autres, comme la forme physique et une bonne hygiène de sommeil réduit le risque de blessure et favorise la récupération musculaire.

Il faut pouvoir encaisser et mémoriser les entraînements.

Pour moi le sommeil et la performance physique sont indissociables.

Les Secrets du Kayak : Est-ce quand on baille cela veut dire qu’on est fatigué ?

Lucile Maffre : Oui, et c’est surtout un signe de fatigue. Il faut faire attention à ces signes de fatigue comme les yeux qui piquent, qui se ferment un peu tout seul, le relâchement musculaire, un ralentissement de la respiration, qui fait qu’on rentre dans le premier stade de sommeil.

Je leur donne un agenda du sommeil pour répertorier nuit par nuit la qualité de leur nuit, et noter dans la journée quels sont les moments pendant lesquels ils sont le plus performant.

Si ça revient à des heures régulières, en profiter pour faire des choses moins contraignantes, pour repartir de plus belle dans l’après-midi.

Précédent
Précédent

Interview : Yves Prigent

Suivant
Suivant

Interview : Claude Bénézit