Interview : Sean Seale

Ceci est une retranscription écrite du podcast enregistré avec Sean Seale en novembre 2021.

Les Secrets du Kayak - Comment vas-tu aujourd’hui ?

Sean Seale : Ça va bien Rudy ! Merci de m’accueillir ici. Je suis de Nyon en Suisse, je suis coach sportif, préparateur physique que ce soit à domicile, en salle.

Je fais faire de la préparation physique avec l’équipe de rugby de Nyon, je fais de plus en plus de tests physiologiques sur les athlètes et j’ai un podcast aussi.

Les Secrets du Kayak : Est-ce que tu te rappelles ton premier souvenir de sport ?

Sean Seale : Oui, la course à pieds vers mes 12 ans au stade local, une super structure avec une belle piste de 400m. Lors d’une course, j’ai du finir deuxième.

En réalité, à force d’attendre les résultats, j’ai cru que je n’étais pas classé, je partais, et là j’entendais l’annonce comme quoi je faisais deuxième. Un bon souvenir.

Ensuite, j’ai fait du foot en tant que gardien pendant plusieurs années jusque mes 13 ans. Puis du judo pendant un an, du karaté pendant deux ans, du kung-fu également.

A 17 ans, j’ai commencé le rugby sous l’influence de mon petit frère qui avait commencé avant moi. Ça m’a plu de suite. Je n’y joue plus mais c’est un de mes sports préférés.

Les Secrets du Kayak : Qu’est-ce qui t’a amené à t’intéresser à l’entraînement et à devenir coach-préparateur physique puis spécialiste dans les tests physiologiques à l’effort ?

Sean Seale : J’ai toujours été intéressé par la performance, je faisais souvent de la musculation, à mon grand désarroi je n’ai jamais travaillé le bas du corps. Maintenant avec le recul j’aurais du faire du travail de renforcement et de sprint.

J’avais toujours un intérêt pour la performance. Au Canada, j’ai découvert le CrossFit. J’en ai fait pendant un an et demi à Vancouver. Je faisais mes entraînements à la maison. Et à partir de là, j’ai fait de la compétition en haltérophilie.

Je me documentais, je lisais beaucoup, j’écoutais des podcasts axés sport performance... Ma femme m’a taquiné en me disant qu’il fallait que les gens me paient pour toutes les études que je faisais, certes non formelles.

J’ai arrêté mon travail, j’ai passé un diplôme de coach sportif et c’était le début de l’aventure.

Au début c’était vraiment pour moi que je le faisais. Aujourd’hui je peux en faire profiter d’autres personnes, le transmettre au travers de mes coaching,

Les Secrets du Kayak : Te souviens-tu de tes premières découvertes qui ont changées ta façon de t’entraîner et de voir l’entraînement ?

Sean Seale : C’est venu tard. Au début, j’ai commencé avec le rugby et je n’avais aucune connaissance sur la performance à ce moment là. Avec le CrossFit, j’ai essayé de bien faire le tour, de tout lire, que ce soit les gens qui le critiquaient ou qui le voyaient d’un point de vue positif.

Au moment de l’haltérophilie, j’ai été très accès “barre”. Au début de mon aventure de coaching, j’étais très axé sur le Back-squat. Pour moi c’était l’exercice qui pouvait régler tous les problèmes du monde.

Je pense que mon plus gros déclic c’est lorsque j’ai commencé à m’ouvrir à toutes les possibilités d’outils qu’on a à notre disposition ou de machines, que tout a sa place tant qu’on a le contexte et la bonne raison pour l’utiliser, que ce soit des haltères, des élastiques etc.

Ça a tourné en philosophie avec la perspective de se demander quand ça colle, pour quoi, dans quel type de pratique... Il faut utiliser chaque pièce pour faire son propre puzzle.

Les Secrets du Kayak : Aujourd’hui je te trouve très spécialisé sur les efforts de longues durées, donc en aérobie. Comment tu en arrives à t’intéresser à cette science de l’entraînement aérobie ?

Sean Seale : Je pense que c’était un de mes intérêts personnels. Cette recherche de la force, de la puissance, dans le cadre du travail fait en haltérophilie. Il y a eu un ouvrage qui m’a vraiment ouvert la perspective sur les filières énergétiques, les différents types d’entraînement que tu peux mettre en place pour ensuite développer ces qualités là.

Tout le coté énergétique m’a fasciné. Ensuite les filières d’application m’ont intéressé, comment l’appliquer au rugby ?

Le point suivant qui a fait tourner les choses pour moi c’était dans le cadre du CrossFit, je cherchais du contenu sur internet, j’ai suivi la classroom d’Evan Peikon pendant le premier confinement, qui remettait en question tout ce que j’avais appris, notamment sur la base de la physiologie qui était sous-jacente aux différents entraînements qu’on mettait en place.

Ça m’a fait repenser ma compréhension des différents mécanismes de l’aérobie, anaérobie, anaérobie lactique... C’était le début d’une nouvelle aventure. C’est une évolution constante.

Et c’est là que j’y ai passé beaucoup de temps d’étude et de recherche pour mieux comprendre ces mécanismes, pour ensuite mieux les utiliser dans notre pratique en tant que coach, et comment les appliquer pour nos athlètes au quotidien pour que nos entraînements aient du sens, et faire avancer «  le bateau plus vite ».

Les Secrets du Kayak : Qu’est-ce que tu as appris de Evan à ce moment là ?

Sean Seale : Le point le plus important, c’était le rôle de l’oxygène dans les différents mécanismes énergétiques qui alimentent la performance. Au travers de ses travaux et des unités de mesures comme le Moxy qui utilise la technologie du NIRS, c’est une lumière proche des fréquences infrarouges qui est émise depuis cet outil dans le muscle.

Cette lumière est redirigée vers le capteur, et donc suivant si l’hémoglobine et la myoglobine sont chargées en oxygène ou pas, elles ont une couleur différente. La lumière est réfractée. Donc à l’aide d’un algorithme le capteur détermine la concentration ou la saturation en oxygène du sang qui se trouve dans les capillaires sanguins, juste avant que l’oxygène soit extrait par les muscles eux même pour leur utilisation.

On découvre par cette technologie que l’oxygène est utilisé dès les premier instant de l’effort. L’utilisation de l’oxygène se fait en instantané et va se prolonger pendant l’effort. Ça va à l’encontre de ce que moi j’avais appris, et donc le but est de comprendre le pourquoi du comment.

Comment on ré-imbrique toutes les connaissances qu’on a eu auparavant mais qui ne semblent pas se faire dans le bon ordre. Qu’est-ce qu’on en fait et comment ça peut nous aider à mieux faire notre travail ?

Les Secrets du Kayak : Est-ce que la théorie de la dette de l’oxygène est toujours valide ?

Sean Seale : Oui, elle est valide dans la sens où il y a des processus qui vont être engagés dès les premiers instants de l’effort. Je ne pense pas que les concepts soient contradictoires. Je pense que ça s’imbrique.

Si tu pars du principe que ton réservoir d’oxygène est plein au début de l’effort, dès le moment où on commence l’effort on va avoir une utilisation de ce réservoir d’oxygène disponible dans notre sang.

Les systèmes cardio-respiratoire, cardiaque et vasculaire ne répondent pas du tac au tac à l’utilisation de l’oxygène. Ils le font par la suite d’où notre fréquence cardiaque qui s’élève, la fréquence respiratoire aussi. Mais oui, dès les premiers instants tu crées une dette d’oxygène qu’il faut ensuite repayer.

Les Secrets du Kayak : Donc si tu as un système cardio-vasculaire et cardio-respiratoire plus développé cela signifie que tu as moins de dette d’oxygène à l’effort ?

Sean Seale : C’est une question intéressante. Je pense que ça dépend du moment de l’effort que tu analyses. Certes il existe une réponse cardiaque quasi instantanée de part différents mécanismes, il y a un délai de réponse, mais il y a des cinétiques de VO2 qui sont plus ou moins rapides.

C’est à dire le temps que prend quelqu’un pour passer d’une VO2 au repos à une VO2 soit maximale soit proportionnelle ou correspondante à l’intensité de l’effort produit. On peut atteindre cette VO2 cible plus ou moins rapidement.

Donc oui c’est possible de manière générale d’avoir les différents systèmes qui se chargent de l’apport en oxygène. Ces différents systèmes peuvent fonctionner plus ou moins bien en réponse à un début d’effort intense, et qui va avoir une influence sur nos performances.

On sait que la cinétique de VO2 est extrêmement importante pour des efforts de type 800m 1500m jusqu’à 3000m. A quelle vitesse ton moteur peut fonctionner à plein régime pour alimenter tout ce qu’il se passe au niveau musculaire et fournir le carburant pour avoir un effort le plus intense possible ?

Donc oui si tu as un système cardio-respiratoire plus développé ça peut avoir un impact positif au niveau de ta dette d’oxygène.

Les Secrets du Kayak : On apprend quelles sont les bases des filières énergétiques avec l’anaérobie alactique qui dure jusqu’à 15s. L’anaérobie lactique qui dure jusqu’à deux ou trois minutes, et on passe surtout en aérobie. Est-ce que ça signifie que si j’améliore ma cinétique de VO2 et mon système cardio-vasculaire et cardio-respiratoire, je peux prolonger en terme de durée des efforts intenses ?

Sean Seale : A mon avis sur un effort assez court de l’ordre de 15-18s, je n’ai pas les chiffres en tête, la cinétique de VO2 n’est pas aussi importante que pour les efforts qui seraient un peu plus long, étant donné que tu ne vas pas vraiment atteindre un état stable au niveau de ta VO2.

En 18 secondes, tu n’es même pas proche de ta VO2 max. Je serais curieux de voir s’il y a vraiment une contribution importante de cette cinétique de VO2. Je pense qu’il y en a une dans une proportion assez basse.

Mais oui de manière générale tu vas pouvoir économiser tes autres manières de recycler de l’ATP en fournissant plus d’oxygène plus rapidement et en plus grande quantité avec une cinétique de VO2 plus rapide.

Les Secrets du Kayak : De ce que je comprends avec les Moxy et après avoir fait le test avec toi, on voit l’importance de l’entraînement local et l’importance de l’adaptation d’un point de vue périphérique ?

Sean Seale : Il y a différents systèmes qui s’imbriquent. Les systèmes respiratoire, cardio-vasculaire et musculaire travaillent ensemble, avec le système musculaire consommateur de l’oxygène en bout de chaîne.

Les deux autres ont pour mission d’apporter l’oxygène aux muscles pour fournir le travail. Il ne faut pas se cantonner à parler d’apport en oxygène, il faut aussi regarder le côté utilisation de l’oxygène.

Suivant la durée et l’intensité de l’effort sur des événements courts, on va avoir une sollicitation davantage nerveuse et musculaire, tandis que plus l’événement se prolonge plus le focus se met sur l’apport d’oxygène.

Mais il ne faut pas oublier que tout fonctionne ensemble et donc il ne faut pas négliger ce qui est métabolique. Il faut comprendre le fonctionnement du corps d’un point de vue global. Il faut travailler tous les différents paramètres qui ont un impact sur la performance pour fournir le meilleur travail possible.

Les Secrets du Kayak : Qu’est-ce qui est limitant d’un point de vue périphérique dans l’utilisation de l’oxygène ? Est-ce que le travail aérobie, anaérobie contribue à un rôle efficace ?

Sean Seale : C’est bien le principe « de la taille », Henneman 1957, que tu développes. L’étude de la séquence au travers de laquelle les différents unités motrices, donc les différentes fibres musculaires sont recrutées suivant l’intensité d’un effort.

Un effort de basse intensité va recruter des unités motrices ayant un seuil d’activation bas. Les adaptations qui vont être engendrées par ce travail vont principalement avoir un impact sur ces fibres là.

Donc si on veut développer la densité capillaire et mitochondriale, il faut se dire que l’intensité du travail utilisé va déterminer quelles fibres seront affectées le plus.

Si tu fais de l’aérobie uniquement de basse intensité, tu ne vas peut être pas avoir un développement optimal des fibres plus rapides, qui certes sont moins efficientes en terme d’utilisation d’oxygène et qui ont beaucoup moins de mitochondries que nos fibres lentes, mais qui vont quand même avoir leur contribution à l’effort. Elles sont donc non négligeables.

Pour améliorer ces qualités locales, périphériques, au niveau de l’utilisation de l’oxygène, il faut davantage de capillaires, de mitochondries, donc amener plus de sang en plus grande quantité pendant des temps prolongés.

Le travail de haute intensité est fondamental pour optimiser la fonction des mitochondries, leur capacité à extraire de grandes quantités d’oxygène à utiliser. Il faut travailler à la fois la basse et la haute intensité.

Les Secrets du Kayak : Comment sait-on si on manque de mitochondries et de capillaires ? Peut-on mesurer un manque d’oxygène localement ?

Sean Seale : Oui le Moxy le permet, sur un muscle, à un instant T. Il mesure l’équilibre entre l’apport et l’utilisation de l’oxygène. On parle de SMO2 pour Saturation Musculaire en Oxygène.

C’est exprimé en pourcentage entre 0 et 100. Au repos tes muscles sont entre 40-70 % de saturation. Si tu as fait un bon échauffement et que tu as un bon développement capillaire tu vas pouvoir atteindre des valeurs de 80% et au dessus.

Pour quelqu’un qui est très bien entraîné et qui a des muscles qui utilisent parfaitement l’oxygène, on va descendre proche de 0% en saturation. Ce qui est intéressant c’est d’observer la tendance, voir comment se comporte la courbe de saturation.

Est-elle plate, est-ce qu’elle monte ou descend ? Est-ce qu’on se trouve au début ou à la fin de l’effort ? Ça se mesure. Ça permet de déterminer si tu fonctionnes de manière optimale sur tel ou tel groupe musculaire.

Les Secrets du Kayak : Qu’est-ce qui ne serait pas optimal et qui indiquerait que tu n’arrives pas à avoir suffisamment d’oxygène, ou bien que cet oxygène est mal utilisé d’un point de vue local ?

Sean Seale : Si tu démarres par un sprint sur un vélo, tu vas voir une courbe qui tombe rapidement. Pourquoi ? Ton muscle vient de commencer à utiliser énormément d’oxygène pour recycler l’ATP et faire en sorte que les contractions puissent continuer. Par contre ton cœur et ta respiration ne sont pas encore réveillés de ton repos, donc tu as un grand déséquilibre entre ton utilisation et ton apport d’oxygène. D’où le fait que la courbe tombe rapidement.

Les travaux d’Evan tendent à démontrer que plus rapidement tu peux extraire l’oxygène et l’utiliser, plus tu vas pouvoir produire de puissance. Donc ta courbe va tomber rapidement jusqu’à ce que ton cœur et la respiration rattrapent leur retard, ce qui permet d’équilibrer le système.

Donc ils vont répondre de manière proportionnelle jusqu’à rétablir cet équilibre d’oxygène ce qui entraîne ensuite une courbe aplatit.

Pour répondre à ta question, il faudrait faire faire un sprint sur un vélo et observer la courbe, sa pente, mais aussi la valeur minimale atteinte durant ce sprint. Le travail de vitesse et de sprint peuvent permettre le développement de ces qualités liées au développement d’une bonne base d’endurance fondamentale pour développer la tuyauterie et donc développer tout ce qui est vasculaire et capillaire.

Les Secrets du Kayak : On peut donc travailler sa cinétique de VO2 pour que l’oxygène arrive plus vite et avoir moins de dette d’oxygène. Cela semble être la même chose au niveau local, on pourrait même parler de VO2 locale, dans le sens où plus rapidement on arrive à utiliser l’oxygène et plus on arrive à générer de force et de puissance lors d’un effort intense. Est-ce que cela est correct ?

Sean Seale : Cela me paraît tout à fait censé. Si on prend une courbe de fréquence cardiaque au début d’un effort intense elle va grimper jusqu’à trouver un état stable, ou bien elle ne plus grimper aussi rapidement.

Tu as la même dynamique sur la VO2 avec une tendance inverse au niveau de la saturation d’oxygène, donc la courbe part vers le bas pour trouver un état stable. On observe un côté apport d’oxygène, et un côté utilisation qui initie l’interaction entre les deux.

C’est ensuite les systèmes chargés de l’apport en oxygène qui répondent à la demande de manière proportionnelle. C’est pour cela qu’on a des représentations graphiques qui sont en miroir avec limite une correspondance assez proche l’une de l’autre.

Les Secrets du Kayak : Lorsque j’ai fait le test avec toi sur l’ergomètre de kayak on a pu déterminer mon facteur limitant : mon système cardio-respiratoire. Je n’inspire pas suffisamment d’air, j’en expire pas suffisamment par rapport à ma taille. Je m’asphyxie. Or, en règle général, on ne pense pas à ce travail cardio-respiratoire.

Est-ce que les capacités inspiratoires et expiratoires sont reliées à la taille ou au poids ? Comment sont prises les mesures de calcul ?

Sean Seale : On parle de spirométrie au repos, un test simple à effectuer en quelques secondes. Tu vas prendre une inspiration complète pour ensuite expirer de manière forcée et continue dans un appareil ayant une hélice.

Cet appareil va mesurer le flux et le volume d’air expiré. Les deux mesures intéressantes sont le volume total expiré dans les 6 premières secondes, on a un bon proxy pour ton volume pulmonaire et donc la place que tu as dans tes poumons.

Et ensuite, on va regarder la première seconde d’expiration, soit le proxy pour ta puissance respiratoire, ta capacité à expirer un volume important dans les premiers instants de l’effort.

De manière générale, tu devrais pouvoir expirer entre 80-85 % de ton volume pulmonaire total dans cette première seconde d’expiration.

Ces valeurs absolues recueillies sont ensuite comparées aux valeurs normatives par rapport à ton origine, ton sexe, ta taille, ton poids, en sachant que toutes ces choses vont avoir une influence sur les capacités pulmonaires de base.

Cela te donne une indication par rapport à la norme. Ce sont des mesures prises au repos pour ensuite, dans le test d’effort, utiliser d’autres outils qui mesurent ta manière de respirer, combien de fois par minute, combien de litres par respiration...

Cela permet de mieux interpréter les valeurs respiratoires pendant l’effort dynamique.

Les Secrets du Kayak : Comment on entraîne ses capacités cardio-respiratoire, faut-il des outils spécifiques ?

Sean Seale : Il existe des outils spécifiques mais je pense qu’il faut déjà essayer de coordonner sa respiration, sa fréquence et son volume respiratoire par rapport à une certaine intensité d’effort.

Cela peut se faire sans matériel. On peut par exemple prendre un vélo avec une vitesse facile, et se mettre à une cadence de 80 rpm et essayer de respirer en 4x4, soit respirer tous les quatre coups de pédales, soit 20 respirations par minute.

On sait que c’est la limite supérieure qu’on voudrait tenir en terme de fréquence respiratoire pour un effort de basse intensité. La plupart des gens sollicitent davantage la fréquence respiratoire au volume. Ce qui entraîne à plus haute intensité une demande d’oxygène au système respiratoire, et donc une sur-sollicitation des muscles participant à la respiration, ce qui génère une dépense énergétique plus importante. Cela met en évidence un potentiel d’économie.

Il existe aussi des outils qui peuvent être appliqués. Comme par exemple pour offrir une certaine résistance soit à l’inspiration, soit à l’expiration, soit au deux. Si tu as un volume pulmonaire dans les normes mais que ta puissance expiratoire est basse, on peut par l’utilisation d’un outil de résistance respiratoire se forcer à expirer plus fort et plus vite.

Tout comme en préparation physique, on utilise une résistance assez basse qui nous permet de travailler rapidement, pour obtenir une expiration complète pour développer ses qualités d’expiration.

Il existe d’autres outils plus élaborés qui eux permettent de travailler un peu plus en se focalisant sur les différents volumes inspirés et expirés. Ces outils peuvent être utilisés pour des carences ou des déficiences au niveau du volume pulmonaire.

Ce qui devient intéressant c’est d’utiliser certaines fréquences respiratoires spécifiques avec certains volumes spécifiques. Toi dans le kayak, tu as une cadence de coups de pagaies à respecter, tu respires de façon coordonnée à ton coup de pagaie pour la stabilité de ton tronc.

Pour toi, on sait que tu dois te forcer à respirer à 40 respirations par minute. Ce travail dans ton cas, à cette fréquence et avec des volumes importants te permettrait à faire un travail spécifique par rapport à la demande de ton sport.

Les Secrets du Kayak : Est-ce que selon toi le powerbreathe est un bon outil ? En existe t-il d’autres à recommander ?

Sean Seale : Pour moi le powerbreathe n’est ni un bon ni un mauvais outil. C’est un outil parmi tant d’autres.

Il se focalise sur la résistance, mais la résistance n’est qu’un paramètre parmi d’autres. L’aspect du volume respiratoire me semble beaucoup plus important et surtout plus intéressant lorsque tu parles de travail spécifique.

Dans ce contexte là, à l’heure actuelle, les deux outils qui existent sont un spirotiger avec qui je suis partenaire, et le P100 qui permet de tout faire : travail de résistance, en volume, coupler les deux, quantifier tes volumes respiratoires.

Il y a un outil en préparation, proche du spirotiger, qui se trouverait être plus intéressant pour le commun des mortels. Ça pourra être utile pour faire un réel travail respiratoire, et pour moi c’est une petite partie de l’entraînement qui peut être intéressante à développer pour gagner en contrôle respiratoire, et mécanique respiratoire et en conscience respiratoire.

Les Secrets du Kayak : Quelle est la marge de progrès possible pour moi ? Est-ce que je peux augmenter mon volume d’inspiration et d’expiration d’un litre ?

Sean Seale : Progresser d’un litre me paraît énorme. Je pense que ça dépend aussi du travail réalisé et de ta morphologie. Peut être que tu ne savais pas utiliser la globalité du volume d’air disponible dans tes poumons.

Le travail respiratoire en lui même ne veut pas nécessairement dire qu’il va te faire pousser un troisième poumon, mais au moins tu pourras mieux utiliser tout l’espace thoracique que tu as à disposition.

Si tu prends comme exemple les apnéistes, ils font un travail de stretching couplé à de la respiration profonde, pour étendre au maximum l’amplitude de leur mouvement au niveau de la cage thoracique afin de stocker un maximum l’air.

On peut imaginer que du travail de mobilité couplé avec du travail respiratoire peut te permettre de gagner pas mal de place. Je pense que le potentiel d’amélioration sera propre à chacun.

La recherche est unanime au sujet des progrès de la performance avec l’ajout de l’entraînement respiratoire. Mais il y a des gens qui y répondent mieux que d’autres. Oui il existe une marge de progrès plus ou moins importante avec ce type de travail.

Tu peux avoir une capacité au repos réduite mais une fonction dans l’effort bien développée, ou vice-versa. C’est pour cela que je les quantifie séparément pendant le test. C’est comme si j’imageais la chose en te disant que pour savoir faire un squat complet, il faut avoir des hanches qui fonctionnent et des chevilles qui plient un minimum, et donc sans le travail de mobilité au préalable tu vas avoir de la difficulté à descendre dans ton squat. Ici, d’abord tu fais en sorte d’avoir de la place, et ensuite tu fais en sorte d’utiliser la place pendant l’effort.

Les Secrets du Kayak : Qu’est-ce qui t’a amené à t’intéresser à tout cela et à proposer ce testing un peu physiologique plus typé aérobie ?

Sean Seale : C’est dans la continuité de mon discours. C’est une passion que j’ai pour le sport et la performance en général.

Le fait d’avoir redécouvert l’aspect énergétique du sport et de me plonger dedans. Je n’en suis toujours pas sorti, je continue à creuser et ça me fascine de pouvoir quantifier et mesurer ce qu’il se passe.

Voir si cela peut apporter certaines réponses à certains profils d’athlètes. Peut être aussi expliquer avec certains paramètres physiologiques le profil d’un athlète. Et ensuite trouver des points d’améliorations potentiels qui peuvent être exploités de manière ciblée.

Non pas pour changer la structure et la dynamique de l’entraînement, pour faire le profil de cette personne. Voir si on privilégie une à deux séances par semaine sur le facteur limitant diagnostiqué, et ainsi faire en sorte par la suite que chaque entraînement paie au maximum.

Les Secrets du Kayak : Comment ça se passe si on veut réaliser un test avec toi ?

Sean Seale : On peut me contacter sur mon site https://beacons.ai/upsidestrength, il est en cours de maintenance. Tu y trouveras tous mes liens en terme de communication.

Je suis sur Instagram, Facebook, Twitter…, je suis partout. On peut me contacter n’importe où.

Pour ce qui est des tests pour tes auditeurs, idéalement le test se passe sur un ergomètre. La modalité du test est importante, il faut pouvoir avoir un transfert sur l’entraînement.

Vous pouvez également retrouver Sean sur Youtube.

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