Interview : Nélia Barbosa

Ceci est une retranscription écrite du podcast enregistré avec Nélia Barbosa en juin 2021.

Les Secrets du Kayak - Comment vas-tu aujourd’hui ?

Nélia Barbosa : Très très bien merci, ce matin j'étais au centre de rééducation pour tester ma lame de course. Et je pars à l'entraînement tout de suite après.

Les Secrets du Kayak : J'ai vu que tu avais fait un crowdfunding, parce que tu avais besoin d'une lame adaptée pour le kayak. J'ai cru voir que tu avais une lame pour la marche, une pour la course à pieds et qu'il t'en fallait une spécifique pour le kayak ?

Nélia Barbosa : Exactement ! Celle pour marcher c'est celle qui m'a été donnée de suite après ma rééducation suite à mon amputation.

Celle pour le kayak on a mis un peu de temps à la développer, parce qu'il fallait trouver une prothèse dans laquelle je serais le mieux possible dans la position assise, qui me permette de pédaler.

Celle de ce matin, c'est une prothèse pour courir. J'en avais une intermédiaire, qu'on appelle un pied multisport, faite pour des appuis pour trottiner. Aujourd'hui je me suis mise à la course à pieds.

Elle était bien pour apprendre les petites foulées. Cette nouvelle lame est beaucoup plus adaptée à la course.

391f1381-7226-4798-9770-2e1176e00c73.jpg

Les Secrets du Kayak : J'ai cru voir que ça t'avait fait du bien de te mettre à la course à pieds ? De rajouter une activité d'endurance en dehors du bateau ?

Nélia Barbosa : Oui, l'endurance en bateau tu peux toujours la travailler mais c'est toujours bien d'ajouter des ateliers supplémentaires. Les valides en fond ils pratiquent le ski en hiver, de la natation, l'idée c'est de se rapprocher des entraînements des sprinters.

Donc oui ça m'a fait beaucoup de bien.

Je faisais un peu de natation, mais ça été freiné avec le covid.

Dès qu'on allait en stage en Guadeloupe il y a une piscine, au Temple-sur-lot aussi, on ajoutait une à deux fois par semaine une séance pour travailler le cardio.

Les Secrets du Kayak : Comment as-tu débuté le kayak ?

Nélia Barbosa : J'ai commencé après une colonie de vacance en Corse. J'ai tellement adoré que j'y suis retourné, et après ça j'ai voulu continuer une activité nautique.

C'était soit la voile, soit le kayak. Une amie m'a déconseillé la voile, en m'expliquant que les animateurs n'étaient pas très compétents.

Je suis partie sur le kayak, et je me suis inscrite au club de Champigny au retour chez moi.

J'ai commencé le kayak assez tard par rapport à d'autres athlètes, j'avais à peine treize ans. Et de ce fait les jeunes de mon âge avait déjà un bon niveau puisqu'ils avaient commencé vers huit ans.

Je les voyais sur l'eau et ça me donnait trop envie d'avoir leur niveau.

J'ai commencé dans un gros bateau plastique, et j'ai voulu me surpasser pour aller avec les jeunes de mon âge.

Les Secrets du Kayak : Tu as commencé directement sur de la course en ligne, ou bien ton club était multi-activités ?

Nélia Barbosa : C'était un club multi-activités, le RESCK, on nous y fait pratiquer un maximum d'activités : slalom, course en ligne, descente.

Ma première année j'ai fait ces trois activités. Et jusqu'à mon amputation j'ai fait beaucoup de slalom.

Je faisais mes compétition en national 2, j'adore l'eau-vive, je trouve ça hyper ludique. C'est après ça que je me suis mise à la course en ligne.

Les Secrets du Kayak : Tu parles de national 2, moi qui n'y connais rien en slalom comment ça marche les classifications ?

Nélia Barbosa : Quand on commence le slalom, les premières courses sont des régionales. On y marque des points qui sont en fonction du classement.

C'est un système complexe, je ne peux même pas t'expliquer le calcul. Si tu as moins de mille points, on passe en national 3 et c'est par inter-région.

Il y a la région nord, la région ouest, sud-ouest etc. A l'époque il fallait être dans les 120 premières filles françaises pour rentrer en national 2.

A l'issue de deux ans en national 3 je suis montée en N2.

En N2 il y a un peu de tout, c'est à dire que les filles qui ont « le moins bon niveau » en N2 sont tout de même capable de descendre un parcours sur un stage d'eau-vive.

L'écart entre les meilleures N2 et les moins fortes est très important. En haut de N2 tu trouves des filles qui vont faire des podiums sur les championnats de France cadet junior, ou des filles qui vont bientôt monter en N1. Les plus jeunes le plus souvent sont en bas du tableau.

Quand j'ai commencé la N2 j'étais en milieu de tableau, je faisais soit des finales B où j'étais dans le haut de tableau de la finale B, soit des finales A et là j'étais plutôt dans le bas de tableau.

Les dernières N2 que j'ai faites, j'étais plutôt bien classé. Mais j'ai un gros défaut : les touches, qui me créent pas mal de pénalités et qui ne me permettent pas de monter sur le podium.

Mais je suis assez satisfaite de mes résultats.

Les Secrets du Kayak : A tes débuts tu étais d'avantage attirée par l'eau-vive que par l'eau plate ?

Nélia Barbosa : J'étais mitigée. Au début j'étais plus attirée par l'eau plate, j'avais très peur de l'eau-vive.

Je n'aimais pas me retourner, ni m'engager. Et je n'aimais pas la compétition, du fait de devoir se lever tôt, il faisait un peu froid, ça demandait de l'engagement.

Je n'étais pas la plus forte, ça me rebutait un peu. C'est à force de faire des stages d'eau-vive que j'ai pris goût à l'eau-vive et à tout ça.

Les Secrets du Kayak : Avant de débuter le kayak, tu avais fait d'autres activités sportives ?

Nélia Barbosa : Non, aucune. Je suis atteinte d'une maladie : la neurofibromatose de type 1.

J'avais une atteinte à la cheville droite assez importante, donc je ne pouvais pas courir. Et j'avais l'idée que pour pouvoir faire du sport, être éligible à un club, il fallait savoir courir, tenir sur ses deux jambes sans aucun soucis.

C'est quelque chose qu'on nous fait croire à l'école, parce que le sport à l'école est essentiellement basé sur le fait de courir, on y faisait du foot, du basket.

Du coup moi je faisais d'autres activités comme du dessin, du violon. J'ai commencé le violon à 6 ans et demi. Ça me plaisait mais je ne m'exprimais pas pleinement.

Les Secrets du Kayak : Comment se passaient tes premières séances, ayant commencé un peu plus tard que les autres, tu as attaqué directement par un rythme un peu plus important ?

Nélia Barbosa : Non, je faisais deux séances par semaine, le mercredi et le samedi.

C'était des activités ludiques, des jeux, de la découverte de la faune et de la flore.

On est un sport d'extérieur, ce sont des valeurs très chers dans le monde du kayak.

Les Secrets du Kayak : Est-ce que tu as eu des ambitions de haut niveau quand tu as commencé en N2 en slalom. Est-ce que tu te voyais en équipe de France, faire des compétitions internationales ?

Nélia Barbosa : Non jamais. J'ai toujours eu de l'admiration pour le haut niveau, ça me paraissait juste inaccessible.

C'est une fois un jeune du club, avant mon amputation, qui m'a parlé des jeux paralympiques. Je n'y avais jamais pensé. J'étais juste une ado qui adoré le kayak et qui pouvait à peine prétendre à la N2.

C'est plus après mon amputation que j'ai tenté la qualification en équipe de France. Mais je l'idéalisais tellement que je ne faisais pas partie de ce monde là.

Je m’entraînais quatre fois par semaine, avec une seule musculation. Mon club était à une heure de route.

J'étais surtout concentrée sur mes études. J'ai choisi ensuite une école proche du club, pour faire mes études post bac pour continuer à m'entraîner. J'ai fait un BTS design de produits, pour de la conception de service et/ou d'objets.

Ça ne m'a pas plu. J'ai fait un an de CESU et je me suis réorienté en design graphique pour travailler dans tous les domaines, en communication, du graphisme pur et dur, de l'interface sur un site web.

f79313d7-2219-4b92-aad0-269990251fcb-lg.png

Les Secrets du Kayak : Comment est venue la décision de l'amputation ? Tu avais imaginé devoir le faire ?

Nélia Barbosa : J'y ai pensé étant plus jeune. Ce pied je le traînait depuis longtemps, il était peu fonctionnel. On me l'a annoncé à l'âge de 10 ans. Et à 18 ans c'était compliqué donc j'ai du prendre la décision.

Ma cheville m’empêchait de marcher, le pied était douloureux, je ne pouvais plus mettre de chaussure. Le chirurgien était confiant, ça devait être juste une opération de plus.

Et en allant voir l'orthopédiste, le verdict était l'amputation. Je me suis effondrée, même si je savais que c'était évident. Il m'a fallu digérer la nouvelle, j'ai voulu avoir un autre avis.

J'ai rencontré un professionnel de la prothèse qui m'a confirmé le verdict, tous m'ont confirmé qu'après cette amputation je vivrais beaucoup mieux, que je pourrai marcher, courir, m'habiller comme je le veux.

Je me suis renseigné sur internet, j'ai vu le nom de Marie-Amélie Le Fur une championne paralympique qui m'a beaucoup inspiré par sa résilience incroyable.

Ça m'a donné envie de me battre, et j'ai pris la décision d'amputer. Ça s'est fait en novembre, comme ça j'avais l'hiver pour faire ma rééducation. J'ai été bien entourée par tous les corps de métier médicaux concernés.

Les Secrets du Kayak : Comment se passe ton réveil après l'amputation ?

Nélia Barbosa : D'ordinaire pour les précédentes opérations j'étais toujours dans un état de stress monumental. Et pour cette opération rien, je n'avais pas peur.

J'étais triste, comme lorsque tu dis au revoir à un ami sur le quai. Au réveil j'étais soulagée, c'était une page qui se tournait, j'allais me reconstruire.

Il y avait de la douleur mais c'était secondaire. On n'y pense pas vraiment.

Ils n'ont pas coupé que le pied, ils ont coupé un peu plus haut au tiers du tibia.

C'est du fait de la réflexion sur le type de prothèse qui va suivre. Plus on ampute bas, plus c'est compliqué d'appareiller. Il faut de la place pour une lame. Et plus il y a de la place, plus tu pourras avoir une lame performante.

Les Secrets du Kayak : Lorsque tu es au centre de rééducation, tu as déjà l'idée de te remettre au kayak ?

Nélia Barbosa : Oui, j'avais déjà ce projet. Dès qu'un patient arrive, les médecins te demande ton projet.

Pour la plupart des patients c'est de marcher, pour les plus âgés faire leur transfert entre le lit et le fauteuil.

Moi je voulais reprendre la bateau le plus vite possible. Le kayak c'était ma thérapie. Je n'avais pas pensé à la course en ligne à l'époque, je voulais reprendre le slalom mais il s'est avéré que ce n'était pas pertinent avec une prothèse, ne serait-ce que pour la sécurité. Donc je navigué sans prothèse.

Puis en course en ligne, j'avais besoin de plus d'appuis donc il me fallait la prothèse.

L'objectif des jeux paralympiques s'est posé après ma sélection en équipe de France.

Après mon amputation je suis allée en stage d'eau-vive avec le club, j'encadrais les petits de la région. Et j'y ai rencontré Sylvain Curinier. Là par hasard en vacances, et il m'a parlé de la course en ligne, en me donnant le contact d'Eric Le Leuch, le coach de l'équipe de France.

Le but était d'essayer la course en ligne et si ça me plaisait, tenter les sélections. Évidemment, il m'expliquait que je ne serais pas prête pour les Jeux de Tokyo, mais tenter Paris.

Je suis arrivée sur les premiers Open de France pour prendre de l'expérience, connaître les autres paralympiques, dont Cindy Moreau médaillée de Rio.

Sur le premier open elle me met huit secondes ce qui était énorme, mais je venais d'arriver je n'avais pas d'objectif de performance.

Et arrive le troisième open, j'avais bien progressé, j'ai gagné six secondes en quelques mois. Donc j'avais la volonté de viser Paris, j'avais le temps.

Et sur ma première sélection internationale j'arrive sur la finale et je vois que je suis deuxième. Du coup j'avais l'espoir d'aller chercher un quota pour les championnats du monde, et pourquoi pas de faire les Jeux paralympiques.

Les Secrets du Kayak : Comment ce sont passés tes premiers entraînements en bateau de course en ligne ? J'ai pu essayer un bateau paralympique et j'ai trouvé que ça freinait. J'imagine que comparé à l'eau-vive, tu avais l'impression de ne pas avancer ?

Nélia Barbosa : Au club, on n'a pas de bateau pour paralympique. Juste des bateaux pour débutants. Et on a des bateaux plus instables.

Quand j'ai commencé je trouvais que oui je me traînais, mais j'avais toujours besoin de mes entraînements slalom, j'en faisais trois en plus de mes entraînements de course en ligne.

Petit à petit j'ai eu un bateau paralympique, plus performant. Plus j'ai progressé, plus j'ai pris plaisir à monter sur l'eau.

Au début je n'avais aucune sensation de glisse. Et ensuite la vitesse m'a plu.

Aujourd'hui je fais deux entraînements par jour sauf les jours de repos. Une séance par jour pour les semaines de repos.

On va chercher la polyvalence aussi avec des séances de musculation. J'en ai fait beaucoup cet hiver, ça va être du vélo, de la course à pieds, de la natation et du slalom de temps en temps.

Ça me nourrit d'une activité à l'autre. J'ai refait des compétitions cet hiver en slalom. J'arrive à engager beaucoup plus, donc j'ai progressé.

Mais en technique je n'ai pas progressé et j'arrivais trop vite sur les portes, donc j'avais des bons temps mais toujours avec des pénalités. J'avais des classements acceptables, mais il faut que j’apprenne à canaliser mon énergie, temporiser.

Les Secrets du Kayak : Comment se sont passés tes premiers championnats du monde ?

Nélia Barbosa : Très angoissant, je ne mangeais plus, j'étais très fatiguée.

Je me suis mise la pression pour obtenir les quotas. Au final j'ai fini quatrième et j'ai engagé la saison avec beaucoup de sérénité puisque je n'allais pas en rattrapage de quota.

J'ai fini donc au pied du podium, mais j'avais amélioré mon temps. Les conditions étaient idéales.

Les Secrets du Kayak : Au début tu idolâtrais les athlètes, est-ce que aujourd'hui tu considères faire partie de ces gens ?

Nélia Barbosa : Aujourd'hui je me considère comme une athlète, d'autant plus quand je vois tout les moyens mis en œuvre pour m’emmener le plus haut possible.

C'est tout le staff qui fait que, mon entourage, tous les donateurs qui me soutiennent. Et au final les personnes que j'admirais avant mon amputation, je suis à leur place actuellement.

Je reçois beaucoup de soutiens de tout horizons, par des sponsors aussi.

Je fais partie d'un collectif appelé Hope, un collectif pour des sports peu médiatisés. Ça permet d'avoir plus de visibilité.

Tu as des gens qui ont juste envie d'aider une athlète atteinte de handicap. J'en suis très reconnaissante.

Les Secrets du Kayak : Le podcast n'est pas encore sorti, mais Rémi aussi a énormément de sponsors comparé aux valides, est-ce que tu aurais une explication à cela ?

Nélia Barbosa : Avant on ne parlait pas de handicap, ça s'est amélioré dès les jeux de Londres et aujourd'hui les gens ont besoin d'une histoire qui touche, avec des valeurs à transmettre, de la résilience.

Le fait d'être porteur de handicap touche et les gens veulent aider à rester une personne.

Même si depuis mon amputation je me considère moins comme porteuse d'un handicap. Ça marche parce qu'on en parle plus qu'avant. Et il existe des quotas pour les en entreprises.

Et je réunis trois catégories : je suis jeune, je suis une femme et je suis porteuse d'un handicap.

Avant l'amputation je cherchais quelqu'un d'inspirant pour remonter le plus rapidement possible cette épreuve.

ECgGTIVXoAYIT-s.jpg

Les Secrets du Kayak : Rémi m'expliquait que vous aviez toute une petite équipe autour de vous. Est-ce que tu ressens ça aussi ?

Nélia Barbosa : Oui on se sent comme dans un cocon. On a eu des stages jusqu'à vingt jours par mois, c'est royal.

On est que trois, on a un super encadrement. Un kiné jute pour nous. Je ne peux pas me plaindre, la FFCK a tout fait pour moi.

D'ailleurs la Guadeloupe c'est le plan parfait. Ici sur la marne l'eau est très haute, froide, il fait nuit tôt.

Là bas il n'y a pas de problème de vague ou de température, ça ressemble beaucoup aux conditions pour Tokyo : de l'eau salée, chaude et humide.

Les Secrets du Kayak : Est-ce que c'est toi qui gère ta communication sur les réseaux ? Tu as l'air assez active.

Nélia Barbosa : C'est moi qui gère tout ça sur facebook et instagram.

La cagnotte créée sur instagram a été gérée par les étudiants qui l'ont relégué. C'était le projet de l'école de commerce du sport qui voulaient me soutenir.

Ils s'en sont occupés aussi sur linkedln.

Les Secrets du Kayak : Qu'est-ce que tu utilises comme matériel.

Nélia Barbosa : Je suis sur un Plastex, un Tokyo, et j'ai une Jantex S minus, je la règle en 209 pour une taille de 1,58 m. Mes adversaires sont plus grandes.

Le Nelo était trop nerveux pour moi, il déviait. Le plastex reste dans sa ligne.

Les Secrets du Kayak : Est-ce que en dehors des entraînements tu te comportes comme une athlète, avec de la préparation mentale, l'alimentation… pour performer ?

Nélia Barbosa : Je fais attention à mon alimentation, tant que je ne prends pas de poids et que je suis bien sur mes entraînements, ça me va.

Au niveau mental je ne fais rien de plus, mais Sylvain Curinier est très à l'écoute et m'aide beaucoup pour me détendre, il partage beaucoup ses connaissances.

Je fais de la visualisation pour ne pas avoir de surprise pour ma course. J'imagine mon start, mes coups de pagaies.

Les Secrets du Kayak : Est-ce que tu vois une différence de ton geste par rapport aux valides ?

Nélia Barbosa : Le but c'est que mon geste doit se rapprocher le plus possible de celui des valides. Et on y travail au quotidien.

Du fait d'être slalomeuse, j'avais la main qui poussait beaucoup. Maintenant j'essaie d'avoir le plus de rotation possible, et d'avoir quasiment le même geste qu'eux pour avoir des chronos les plus bas possibles.

Mon point faible c'est surtout physique, je pars bien sur un 200m ma courbe monte bien mais je redescend trop vite.

Il faut que j'arrive à tenir sur une course de 200m voir un peu plus pour ne pas exploser à la fin du 200m. Je relance toujours trop tard, ce qui me fait perdre des centièmes. J'ai besoin de ne plus m'effondrer.

Pour travailler ça les séances types sont un peu dures, je ne les aime pas. Il va falloir faire des 45'' à bloc, avec 30'' de récup, sur quatre séries.

Je prends 5' de récup. Et on le fait en tout trois fois.

Ça demande de la concentration énorme, de puiser dans ses ressources. Ce sont des séances indispensables pour progresser. Je crache mes poumons.

Mes séances préférées sont celles de 200m, pour voir où j'en suis. Pour valider mes séances précédentes. Et ça veut dire que les courses sont proches.

Les Secrets du Kayak : Est-ce que tu sens que la musculation t'aide pour tes séances en bateau ?

Nélia Barbosa : Énormément. Quand j'ai commencé le bateau en développé couché j'étais à 52 kg en max.

Cet hiver j'ai réussi à monter jusque 65 kg. Je le ressens en bateau, j'ai plus de puissance dans la pagaie.

J'aime bien la musculation, je sens que ça m'aide beaucoup. Et de toute façon, je prends tous les outils qui peuvent m'aider à progresser.

Les Secrets du Kayak : Est-ce que tu as des horaires aménagés pour ton parcours scolaire ?

Nélia Barbosa : Oui, bon cette année je ne suis pas allée beaucoup à l'école. Le but c'est d'être là, quand je ne suis pas en stage. En stage je fais les cours à distance.

C'est sur que quand tu rentres de stage il y a la fatigue et le décalage horaire. Donc quand je rentre je me repose sur trois-quatre jours.

Et ensuite je continue de m'entraîner quand je suis en Île-de-France, et le rythme ne laisse pas beaucoup de place à l'école. Je fais trois matinées par semaine.

d59f5a89-cfe4-40a5-bc43-524f594abea3.jpg

Les Secrets du Kayak : Et est-ce que tu as une vie sociale en dehors ou bien tout est focalisé autour du kayak ? Bon bien sur les Jeux arrivent, mais est-ce que tu t'accordes des sorties ?

Nélia Barbosa : C'est important d'avoir une vie en dehors du kayak, pour parler d'autres choses.

Je ne bois pas d'alcool dans les périodes de compétition, mais sinon j'aime bien aller boire des verres avec des potes, d'aller au cinéma.

Ça fait partie de mon entraînement mental. J'ai besoin d'avoir autre chose à côté. De penser à autre chose.

Les Secrets du Kayak : Les jeux se profilent, je suppose que tu as l'objectif de la médaille ?

Nélia Barbosa : Gagner ne va pas être évident. Mais je fais tout pour être au top niveau le jour de la finale. Mon objectif serait de faire une médaille. Même si c'est la troisième place, je serais déjà très heureuse.

L'ouzbek je ne l'ai pas vu depuis deux ans, donc je ne sais pas comment elle peut se positionner.

Ensuite il y a l'anglaise qui a beaucoup progressé et qui est 10'' devant moi. Je me dis que ce n'est pas inaccessible.

J'ai encore une bonne marge de progression. Et si ce n'est pas pour cette année, il y aura les championnats du monde et d’Europe.

L’iranienne aussi était devant moi, mais avec le confinement je ne sais pas comment elle a pu s'entraîner.

Les Secrets du Kayak : Est-ce que tu penses que c'est un frein de ne pas avoir spécialement de partenaires d'entraînement dans ta progression ?

Nélia Barbosa : C'est vrai qu'être quasiment seule, c'est un frein. Je me suis beaucoup entraînée avec Rémi, c'était des séances très longues de type d'EB1 sur 1h15, on se soutenait bien.

Sur les séances de 200m on aime qu'il y ait du monde, pour plus de confrontation.

Et quand il y a des filles qui vont plus vite que moi, c'est un élément moteur.

Dans mon club j'ai la chance qu'il y ait une bonne dynamique. Je trouverai toujours quelqu'un pour m'accompagner sur l'eau. Finalement je suis rarement seule.

Les Secrets du Kayak : Est-ce qu'il y a des points, en dehors de ton entraînement, dans lesquels tu te vois progresser dans les années à venir ? Est-ce que tu te vois faire appel à un diététicien ? Voir un ostéopathe plus régulièrement ? Tu penses qu'il y a des choses sur lesquelles tu peux t'investir pour performer d'avantage ?

Nélia Barbosa : Oui, sur ma récupération physique, je vois peu l’ostéopathe ou le kiné. Le kiné est présent en stage, mais quand je suis chez moi, je cours partout.

Mais j'en aurai besoin à l'avenir, pour éviter de me blesser et récupérer pleinement.

Je néglige trop ce point. Mais il va falloir y penser pour enchaîner les années de haut niveau.

J'utilise des électrodes quand vraiment j'ai des grosses courbatures, sinon je fais des bains chauds pour bien me détendre.

Les Secrets du Kayak : Quand j'ai interviewé Eugénie, elle m'a expliqué avoir fait des stages avec les canadiennes. Est-ce que ça t'arrive des faire des stages avec des étrangers ? Ou c'est toujours entre vous ?

Nélia Barbosa : C'est toujours entre nous. Cette culture des stages internationaux n'est pas développée, mais on a quand même eu des hongrois qui sont venus en octobre, c'était bien de découvrir les entraînements, de naviguer avec eux.

Aujourd'hui j'ai des concurrentes qui me contactent pour participer à des stages ensemble. Je suis très ouverte à ça. C'est novateur dans le monde du para et très enrichissant pour tout le monde.

On se suit sur les réseaux sociaux, sur les stories, on se salut mais on ne communique pas vraiment ensemble.

Les Secrets du Kayak : Rémi me disait bien aimer l'ergomètre lorsqu'il n'était pas en stage, est-ce également ton cas ? Ou finalement tu peux monter facilement sur l'eau comme tu veux ?

Nélia Barbosa : Non moi je ne fais pas beaucoup d'ergomètre, ou alors en hiver si je ne peux pas monter. Mais mon club est ouvert quasiment tout le temps, il y a toujours du monde. Je suis assez autonome. Je préfère aller sur l'eau.

Capture-d’écran-2020-09-30-à-20.41.26.png

Les Secrets du Kayak : Tu dis être souvent à ton club, donc tu n'es pas directement au pôle de Vaires hors stage ?

Nélia Barbosa : Non, en plus j'ai besoin de voir mon entraîneur Benoît Chantry, j'ai besoin de voir les jeunes s'entraîner.

Mon club c'est ma deuxième maison. C'est un besoin que de garder ce lien. On a un plan d'eau magnifique sur la Marne, je préfère m'entraîner à Champigny.

Même si je pourrais être avec d'autres athlètes à Vaires.

J'ai un groupe de jeunes qui avancent bien, donc j'ai la confrontation nécessaire à la performance. Et on a une salle de musculation avec ce qu'il me faut pour mon entraînement.

Les Secrets du Kayak : Est-ce que tu avais d'autres points à développer ?

Nélia Barbosa : Peut être des conseils, pour des gens en situation de handicap. Qui souhaiteraient se mettre au kayak.

Le kayak est un sport de compétition mais surtout de passion, on peut le pratiquer juste par plaisir.

L'eau-vive c'est ludique, on peut vraiment s'éclater.

Et c'est un milieu bienveillant. Les gens tendent la main sans se poser la question.

Il ne faut pas hésiter. On découvre de belles personnes et de beaux endroits.

Vous pouvez retrouver Nelia Barbosa sur son compte Instagram.

Précédent
Précédent

Interview : Quentin Urban

Suivant
Suivant

Interview : Nicolas Lambert